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Marie-Jeanne et Robert Duval ont trois enfants : Albert, Raphaël et Fleur. Le portrait de leur famille s'esquisse sur une douzaine d'années, à travers cinq journées particulières.
LE PREMIER JOUR DU RESTE DE TA VIE, ou cinq jours décisifs dans la vie d'une famille de cinq personnes, cinq jours plus importants que d'autres où plus rien ne sera jamais pareil le lendemain.
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ENTRETIEN AVEC RÉMY BEZANÇON
LE PREMIER JOUR DU RESTE DE TA VIE, votre deuxième film, trace le portrait d'une famille. Qu'est-ce qui vous a donné envie de traiter de ce sujet ?
Ma propre famille compte beaucoup pour moi et, même si le film n'a rien d'autobiographique, j'ai voulu lui rendre hommage à ma manière. Je me suis toujours demandé qui j'aurais été si j'avais été élevé par d'autres parents que les miens. Sûrement quelqu'un de complètement différent. Mais qui ? La vie familiale, c'est à la fois ce qui nous modèle et ce dont on s'affranchit. C'est le lieu de toutes les transmissions et de toutes les impasses. Mais pouvons-nous faire le tri dans ce qui nous est légué ? Quel rôle joue la famille dans notre trajectoire personnelle ? Et quelle est notre part de liberté ? Ces questions étaient déjà présentes dans mon premier film MA VIE EN L'AIR, et dans mes courts métrages. Chacun de mes personnages apporte sa réponse.
La vie de la famille Duval est racontée sur douze ans mais en cinq jours seulement. Pourquoi avoir choisi cette structure ?
L'idée de filmer cinq jours décisifs dans la vie de chacun s'est imposée dès l'écriture du scénario. Même au sein de la famille la plus unie cohabitent toujours des êtres très différents les uns des autres. J'ai pensé qu'une construction en étoile montrerait mieux cette altérité. Chacune des cinq journées correspond à un membre de la famille que nous suivons au plus près du matin jusqu'au soir. La contrainte a été qu'en changeant de point de vue on ne perde jamais les autres personnages. Plutôt qu'un film choral, j'ai eu envie d'un film avec cinq personnages principaux car ce qui m'intéresse c'est de voir comment dans une famille les uns déterminent les autres. Et puis ça m'a permis de jouer avec de longues ellipses de temps. J'aime l'idée de laisser le spectateur imaginer ce qui a bien pu se passer entre ces ellipses.
Cette construction narrative a aussi eu des incidences sur votre mise en scène ?
Oui, nous avons fait en sorte avec Antoine Monod, le chef opérateur du film, que chaque journée ait sa propre logique cinématographique, qu'elle soit traitée à chaque fois à travers le prisme du personnage que nous suivons. Par exemple la journée d'Albert, le fils aîné qui quitte le nid familial, a été filmée en courte focale ce qui a la particularité d'accentuer les distances, d'éloigner les sujets les uns des autres et donc de souligner la prise d'indépendance du personnage. Tandis que la journée de Fleur, la petite dernière qui rue dans les brancards, est saisie par une caméra à l'épaule. Pour Raphaël l'enfant du milieu, on a utilisé une steadycam, une caméra un peu flottante, à son image. Marie-Jeanne, la mère, est quant à elle enveloppée dans un écrin d'intimité, le décor disparaît derrière elle en flou grâce à la longue focale. Pour la journée de fin, celle de Robert, le père, j'ai souhaité une image apaisée, une lumière qui accuse les lignes, un peu comme dans les tableaux d'Edward Hopper.
En dépit de son humour et de son énergie, votre film a une tonalité mélancolique, voire nostalgique. L'enfance semble un paradis perdu. Peut-on dire que le temps qui passe est l'un des protagonistes à part entière du film ?
C'est au coeur d'une famille qu'on sent le mieux filer le temps (surtout quand on revoit les films super 8 de sa jeunesse !). Les enfants qui grandissent, les parents qui vieillissent... Selon sa place d'ailleurs, la perspective n'est pas la même. Chacun développe alors son propre rapport au temps. Fonceur, avançant sans se retourner pour mieux fuir les regrets et les états d'âme, Albert vit sa vie en accéléré. Raphaël vit plutôt la sienne au ralenti, pour lui demain ressemble à l'éternité. Et si Fleur serait prête à installer sa chambre dans la cave pour vieillir plus vite, comme le vin, Marie-Jeanne elle, préfèrerait que le temps s'arrête ou mieux, qu'il fasse machine arrière. Quant à Robert, en bon hédoniste il vit au jour le jour. J'ai trouvé amusant de confronter les rythmes de vie de tous ces personnages, les enfants, les parents, et même les grands-parents qui considèrent souvent eux aussi que leurs propres enfants ne grandissent jamais, y compris quand ils ont les cheveux blancs depuis belle lurette !
Comment avez-vous choisi la bande son ?
Pendant l'écriture du scénario, j'écoute pas mal de musique, c'est très inspirant. Je cherche souvent le morceau qui pourrait illustrer la scène en cours. Pour la version de «Summertime» interprétée par Janis Joplin, il m'a paru évident que Marie-Jeanne devait aimer, c'était tout à fait son genre. Parfois, ce qui me touche c'est au contraire le paradoxe entre les paroles et la situation : «In Pursuit of Happiness» de The Divine Comedy pour la scène de l'hôpital après l'accident de Marie-Jeanne ou l'éblouissant «Perfect Day» de Lou Reed pour l'épilogue. Certains plans m'ont été soufflés par une chanson. Lorsque je travaillais sur la journée de Fleur, je me suis mis à la recherche d'une musique lyrique et barrée, pure et décadente à la fois. Comme l'album «Aladin Sane» de David Bowie. La chanson «Time» collait parfaitement à la scène où Fleur décide d'abandonner sa virginité à Sacha. Juste après, quand elle rentre chez elle, traversant le jardin enneigé en traînant des pieds, je n'ai pas pu m'empêcher d'adapter ma mise en scène au morceau : Bowie y compare le temps à un sniper isolé, prêt à tirer. Le plan large sur le jardin est devenu le point de vue de ce sniper : il fallait le saisir en caméra épaule et en zénithal. Le seul hic c'est que la méthode est risquée, on n'obtient pas toujours les droits musicaux des chansons sur lesquelles on a rêvé !
Et le titre d'Etienne Daho «Le premier jour (du reste de ta vie)», vous l'aviez également en tête en écrivant le scénario ?
Le titre de mon film m'a été inspiré par une phrase d'AMERICAN BEAUTY, le chef-d'oeuvre de Sam Mendes. Je dois avouer que je ne connaissais pas la chanson d'Etienne Daho. C'est Isabelle Grellat, ma productrice, qui me l'a fait découvrir une fois que j'ai eu terminé d'écrire le scénario. Je l'ai trouvée magnifique, et surtout j'ai été stupéfait de voir à quel point les paroles faisaient écho à mon film. Dès lors, je n'ai eu qu'une idée en tête, qu'elle conclue le film en beauté.
Comme dans MA VIE EN L'AIR, c'est Sinclair qui a composé la musique originale ?
J'ai eu beaucoup de plaisir à travailler avec Sinclair sur mon premier film et il m'a paru évident de faire à nouveau appel à lui. Il est une des premières personnes à avoir lu le scénario, nous avons donc travaillé très en amont tous les deux. Ensuite, il est souvent venu sur le plateau pour capter l'air ambiant (ne ratez pas son apparition en Angus Young dans le film !). Il était aussi présent au montage bien sûr, pour caler ses compositions au plus près des images. Nous nous entendons très bien lui et moi, peut-être parce que nous avons la même approche : nous aimons tous les deux travailler en famille.
Êtes-vous certain que votre film n'a rien d'autobiographique ?
Je me suis évidemment inspiré de ce que je connais. Bien qu'à ma connaissance ma mère n'ait écrasé ni écureuil ni chien, et que mon père croit sans doute que Led Zeppelin est un dirigeable et Oasis une boisson à base de concentré d'orange. J'ai deux frères aînés et une petite soeur qu'on a un peu couvée, comme dans le film. Leur parcours n'a rien à voir avec mes personnages, bien sûr... Même si dans la première version du scénario, les enfants Duval étaient quatre, comme nous ! Pour recentrer l'action, j'ai dû supprimer un des personnages : j'ai sacrifié celui qui était le plus proche de moi. Du coup, je me suis sans doute projeté tout autant dans chacun des personnages. Je les ai aussi nourris d'une infinité de détails piochés à droite et à gauche, et parfois très loin de mon univers familial. Peut-être retrouverez-vous des choses qui vous sont arrivées à vous...
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MERCREDI 24 AOÛT 1988 CHIENS DE FAÏENCE
«La famille est une machine à broyer les sentiments.»
Albert a 20 ans, l'âge de prendre son indépendance. Au grand dam de sa mère, il déménage dans une petite chambre de bonne au-dessus de chez son grand-père. Comme au jeu des chaises musicales, la place libérée au sein de la maison va pousser les autres membres de la famille à changer de rôle.
La chaise vide
Dans une famille, on est toujours modelé par le regard des autres. Alors il suffit que l'un s'en aille pour que tous en soient transformés. Quant Albert quitte la maison, chacun réagit à sa façon. Son frère Raphaël pense qu'il va enfin pouvoir respirer, Fleur tente de récupérer la chambre, et Robert décide de s'en faire un bureau. Un bureau ou un garage ? Il est chauffeur de taxi ! Aucune importance, il y rangera sa collection de vinyles. Voilà une occasion de démontrer qui est le chef dans cette famille. Seule Marie-Jeanne vit cet épisode comme un drame et une chaise vide à sanctuariser : «Notre famille se désagrège !» À travers cette journée, j'ai voulu saisir ce moment précis où chacun va devoir remettre sa place en question.
Un homme pressé
Les premières paroles d'Albert dans le film sont : «J'y vais !» Oui, mais où ? Et que laisse-t-il derrière lui ? Albert est le fils aîné, celui sur qui repose l'ambition familiale. Et de fait, il semble tout réussir... mais se plante sur l'essentiel. Pressé de fuir sa colère, sa honte, son envie de cogner dans les murs ou sur le nez de son frère, il fonce dans la vie tête baissée. Il lui faudra du temps pour s'apercevoir qu'il fait fausse route.
Pas peur du noir
Albert est un personnage assez dur. C'est sur lui qu'ont pesé les frustrations cachées et les vieux conflits familiaux. Normal qu'il en ait gardé quelques ressentiments et qu'il ait vite pris la tangente. Mais il a aussi une grande force, celle de ne pas craindre de changer. De point de vue, de route, de métier... Car au fond, il sait que le meilleur reste immuable, la preuve : LES SEPT MERCENAIRES n'ont pas pris une ride. En regardant ce film dans la pénombre de sa petite chambre de bonne, les dialogues résonnent encore dans sa tête comme lorsque, enfant, il les rejouait avec son frère.
Pio Marmaï
Même si on se met plus en danger, c'est toujours très excitant de miser sur de jeunes comédiens encore inconnus, de faire découvrir de nouveaux talents. Je me suis donc lancé à la recherche de la perle rare. Et quand j'ai rencontré Pio Marmaï, j'ai été bluffé par son charisme, la force de son regard. Il allait être exceptionnel. D'ailleurs, il a passé son temps à me surprendre !
2007 LE PREMIER JOUR DU RESTE DE TA VIE de Rémi Bezançon
VENDREDI 3 DÉCEMBRE 1993 LES LIENS DU SANG
«Vous pouvez pas comprendre...»
Cinq ans ont passé. Aujourd'hui, Fleur fête ses 16 ans. Un jour parfait pour perdre sa virginité. Et rappeler à sa mère qu'elle n'est plus toute jeune, elle. La guerre entre la fille et la mère a commencé... il va y avoir du sang !
Smells like teen spirit
Je me souviens très bien de l'impression diffuse et angoissante de solitude, d'incompréhension et d'exaltation que condense cette période de notre vie : l'adolescence. On l'a tous ressentie, non ? Fleur expose sa collection de sens interdits sur la porte de sa chambre, colle des photos sur les murs, de préférence des portraits de Kurt Cobain qu'elle idolâtre, et déchire consciencieusement ses jeans en espérant que ça agacera ses parents. Le problème survient quand au lieu de s'énerver, la mère trouve plus amusant d'imiter la fille.
Millésime 90
Fleur est une ado en pleine période grunge : nous sommes au début des années 90. Si j'ai eu envie de mettre en scène cette époque, c'est parce qu'elle porte en elle de façon absolue tout le désenchantement que je voulais trouver dans les yeux de Fleur. Les années 90 ont quelque chose de tragique : c'est la mort du XXème siècle. Gainsbourg et Coluche ont déjà disparu. Leurs photos apparaissent sur le mur où Fleur a affiché toutes ses icônes. Ce sont celles de ma jeunesse à moi aussi...
Au plus intime
En entamant l'écriture de ce personnage, je me suis demandé comment entrer dans la peau d'une jeune fille de seize ans. J'ai commencé par diluer en elle les souvenirs de ma propre adolescence, mes passions ultra exacerbées, mes tentatives pitoyables de rébellion face à mes parents, mes doutes et mes peurs. Ensuite, passer par le support du journal intime m'a beaucoup aidé. J'ai cherché à imaginer ce qu'elle pouvait y cacher comme secrets, et c'est comme si elle s'était directement confiée à moi.
Déborah François
Pour incarner cette petite fille modèle en pleine révolte, Déborah François était l'actrice idéale. Malgré sa violence, son bouillonnement intérieur et ses excès, Fleur est avant tout une ado sensible, fragile, une vraie gentille. Déborah possède elle aussi cette contradiction : sous son apparence angélique elle cache une bombe d'émotions contenues. Qu'elle sait exprimer à la perfection.
SAMEDI 22 JUIN 1996 MAGIC FINGERS
«Cet appartement c'est un peu comme... une machine à voyager dans le temps.»
Comme tous les samedis, Raphaël, 25 ans, rend visite à son grand-père qui a décidé de lui enseigner l'oenologie. Autour d'un verre de Bordeaux, ils se confient l'un à l'autre. Pierre parle de Claudine, sa femme, trop tôt disparue pour que ses petits-enfants puissent la connaître. Et Raphaël repense à Moïra, son premier amour. L'occasion pour tous les deux d'effectuer une sorte de voyage dans le temps.
Procrastina... quoi ?
Procrastination. Ce mot, Raphaël n'arrive même pas à le prononcer et pourtant il en est la plus parfaite incarnation. Lui qui est toujours d'accord pour remettre au lendemain ce qu'il devait faire avant-hier... Aucune contrainte ne l'atteint. J'adore ce genre de personnage, suffisamment branleur pour n'avoir aucun emploi du temps, donc disponible pour n'importe quelle aventure, même la plus barrée. C'est idéal pour un auteur !
Rêve et réalité
Raphaël est celui qui porte les rêves de la famille, par opposition à Albert qui s'est chargé des angoisses et des devoirs. Du coup, au lieu d'avancer dans la vie, il passe dix ans dans le fantasme. C'est sa grande oeuvre ! Et de ce côté-là, rien ne l'arrête. Amoureux fou pendant des années d'une fille qu'il n'a croisée que cinq minutes, il se persuade sans problème qu'il peut retrouver son numéro de téléphone au fin fond de sa mémoire en se concentrant bien. Et quand il participe à des concours de guitare, il ne s'agit pas de jouer mais juste de faire semblant. L'air guitar, c'est très simple, ça ne demande qu'un peu d'imagination. Tout ça le rend plutôt cool aux yeux de tout le monde, mais il faut quand même rester réaliste : on ne peut pas juste vivre d'amour, d'eau fraîche et de heavy metal. C'est tout le problème des rêves : le moment où l'on se réveille.
L'héritier
Raphaël n'hésite jamais à tenter ce dont on meurt tous secrètement d'envie. Comme monter sur scène pour faire semblant d'être une rock star ne serait-ce que pendant trois minutes. S'il peut se le permettre, c'est parce qu'il est déchargé de toutes les responsabilités qu'on a préféré faire peser sur son frère. Les pieds ancrés dans la réalité, c'est pour Albert, les chimères et les élucubrations pour Raph. Qui devient alors l'héritier des passions des autres, surtout celles qui ne se sont jamais concrétisées. Son grand-père lui transmet l'amour du vin, son père celui du rock, et Raphaël prend tout. Ainsi, c'est grâce à sa capacité d'absorption qu'il trouvera finalement sa voie.
Marc-André Grondin
En voyant C.R.A.Z.Y., le film de Jean-Marc Vallée, j'ai tout de suite flashé sur Marc-André Grondin. Son regard à la fois charmeur et enfantin collait parfaitement au personnage de Raphaël. C'est un comédien excessivement talentueux, vif, pointilleux et surtout, il a une qualité que j'apprécie par-dessus tout : c'est un «détecteur de conneries». J'appelle ainsi les gens capables de sentir quand quelque chose sonne faux, un dialogue, une situation, un costume. Le terme n'est pas de moi, j'avais entendu James Cameron l'employer en parlant de Leonardo Di Caprio quand il le dirigeait sur TITANIC. J'ai bien aimé l'expression.
VENDREDI 25 SEPTEMBRE 1998 SI LA TERRE TOURNE, TU TOURNES AVEC ELLE
«Je voudrais que les choses soient différentes, que tout redevienne comme avant. Quand ton père m'aimait passionnément et que pour vous trois j'étais la seule au monde.»
Mal baisée. Voilà comment Fleur parle de sa mère dans son journal intime. Bien sûr, Marie-Jeanne n'aurait jamais dû le lire... Mais comment résister à la tentation ? Ces deux mots vont résonner tout au long de cette interminable journée qui poussera Marie-Jeanne dans les retranchements de la crise de la cinquantaine.
Quel âge vous me donnez ?
Même si je me suis un peu inspiré de mon entourage familial pour écrire ce film, toute ressemblance avec des personnes existantes serait purement fortuite : ma mère ne fume pas de joints, Marie-Jeanne si ! Évidemment, avec un prénom pareil... Ne nous méprenons pas, malgré ces petites incartades elle reste une mère de famille tout à fait responsable. Elle a juste décidé de ne pas ranger tout de suite les souvenirs de l'époque où elle s'en roulait un, en virevoltant dans une longue robe à fleurs sur du Janis Joplin.
Apocalypse now
À l'approche des cinquante ans, Marie-Jeanne refuse de faire le deuil de sa jeunesse. Le problème, c'est que celle qui a vingt ans dans la maison ce n'est plus elle, c'est sa fille ! Et Fleur vit comme une fille de son âge : sans compromis. De plus en plus indépendante, bordélique et insolente, elle est passée maître dans l'art de torturer sa mère. Qui résiste comme elle peut. Mais la guerre se poursuit tant qu'il y a des combattants.
Maman pour toujours
Avec cette journée apocalyptique, j'ai voulu rappeler qu'une maman demeurera toujours le centre névralgique d'une famille, c'est un hommage irrésistible de ma part. Même s'il s'agit aussi d'une illusion. Car au-delà de l'idée que Fleur, Raphaël et Albert se font de leur mère, Marie-Jeanne est avant tout une femme. Et si en tant que mère elle paraît immortelle, en tant que femme elle redevient hélas vulnérable. Et pleine de désirs aussi. Seulement peut-on rester désirable toute sa vie ?
Une autre question qui peut vite devenir lancinante...
Zabou Breitman
Quand j'ai rencontré Zabou, j'ai immédiatement senti qu'elle allait incarner à merveille Marie-Jeanne, cette mère qui tente de rajeunir en même temps que ses enfants grandissent. En plus d'être une grande réalisatrice, c'est une actrice de génie. Elle peut tout exprimer : la douceur d'une mère, la sensualité d'une femme, les émotions les plus subtiles, le tout allié à un grand sens de la comédie. J'ai eu l'impression qu'elle comprenait Marie-Jeanne intimement. D'ailleurs, dès qu'elle apportait une nouvelle idée sur le tournage, elle disait : «Ça, c'est une marie-jeannerie !»
VENDREDI 26 MAI 2000 NOTRE PÈRE
«Vous regarder grandir tous les trois, c'est le plus beau spectacle auquel j'ai assisté dans toute ma vie.»
Aujourd'hui, Robert apprend une nouvelle qui va changer le reste de sa vie de manière irrémédiable. Pour lui qui vit chaque jour comme si c'était le dernier, un nouveau défi s'annonce.
Rock'n'Robert
Le personnage de Robert n'est pas vraiment le père de famille modèle. Au contraire, il a des restes d'ado attardé. On l'imagine volontiers à vingt ans, jeans serrés, chaussures pointues et blouson de cuir, en train de poser religieusement le dernier 33 tours des Stones sur sa platine. Robert est avant tout un passeur. Ainsi, il lègue à Raphaël sa passion pour les guitar heros («Alan Collins et sa guitare Explorer, blanche et or...»). Il prend aussi le temps de transmettre ses valeurs, en montrant à Albert qu'il n'est jamais trop tard pour affronter ses démons. Même quand il s'agit d'une sombre affaire de poils pubiens qui date d'il y a plus de trente ans...
Taxi driver
Parfois c'est l'envie très précise d'une scène qui va imposer certains éléments de l'histoire. En commençant le scénario, j'ai vite eu en tête que Robert et son fils aîné auraient un vrai problème de communication qui les mènerait à une rupture. Comment deux personnes qui ne se parlent plus peuvent-elles renouer le dialogue ? Je ne suis pas un grand bavard mais s'il existe un endroit où je peux facilement parler, c'est bien la banquette arrière d'un taxi (ou le confessionnal ! Remarquez, les deux ne sont pas si éloignés que ça). J'avais ma scène : Albert entre par hasard dans le taxi de son père et les deux hommes vont, en jouant au jeu des apparences, arriver à se parler enfin. J'avais le métier de Robert.
Like a rolling stone
En tant que chauffeur de taxi, Robert se vit comme un raté socialement. Mais il essaye de se rattraper tant bien que mal dans son rôle de père. Il faut dire que les choses n'ont pas été aussi simples avec son propre père, joué par le génial Roger Dumas. Dans un monde idéal, Robert aurait repris le domaine viticole familial... Mais la mort de sa mère les a enfermés dans une douleur inexprimable, brouillant définitivement la communication entre eux. Face au «Commandeur» Pierre Duval, Robert est bien obligé de rester philosophe. Voire fataliste. Il a une méthode très simple : vivre tous les jours pleinement le premier jour du reste de sa vie.
Jacques Gamblin
Quand j'écris un scénario je m'interdis de penser à un acteur en particulier, je n'ai pas envie que mes personnages soient influencés par une voix, un physique, une gestuelle... C'est troublant, cette rencontre avec celui ou celle qui va prendre possession du rôle. On croyait connaître son personnage sur le bout des doigts, et tout d'un coup il est là devant vous, en chair et en os et il dévoile de nouvelles facettes qui deviennent évidentes. Jacques aime parler de son rôle très en amont et c'est un grand bonheur pour un réalisateur de sentir que son personnage sera joué avec autant de précision. J'ai eu énormément de plaisir à le diriger. Son instinct et son perfectionnisme, son charme et son élégance forment un mélange détonnant. Il est terrien et lunaire à la fois. C'est un paradoxe très inspirant.
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Equipe Artistique
Robert Jacques Gamblin Marie-Jeanne Zabou Breitman Fleur Deborah François Raphaël Marc-Antoine Grondin Albert Pio Marmaï Pierre Roger Dumas Prune Cécile Cassel Eric Stanley Weber Clara Sarah Cohen-Hadria Moïra Camille de Pazzis Sacha Aymeric Cormerais Mathias Moreau Jean-Jacques Vanier Philippe Philippe Lefebvre Le docteur Marcaurel François-Xavier Demaison Le rasta blanc Gilles Lellouche La maîtresse du chien Françoise Brion TechniqueScénario et réalisation Remi Bezançon Producteur Isabelle Grellat Producteur Eric Altmayer Producteur Nicolas Altmayer Directeur de la photographie Antoine Monod Monteuse Sophie Reine Son Eddy Laurent Son Olivier Walczak Son Anne Gibourg Son Emmanuel Croset Musique Sinclair Décors Maamar Ech-Cheikh Costumes Marie-Laure Lasson Directeur de production Thierry Muscat Directrice de post-production Patricia Colombat 1er assistant réalisateur Jean-Louis Frémont Casting Maya Serrulla Collaboration artistique Vanessa Portal